Enfant, Pascale Legault passait le temps en lisant des revues médicales.
Fille de deux médecins, elle s’intéresse très jeune à la science, avec un penchant tout particulier pour la biochimie. « J’ai toujours eu une grande soif de savoir. La biochimie répondait donc à tout ce que je voulais apprendre : biologie, physiologie, chimie, physique, informatique. »
Son histoire d’amour pour les sciences commence réellement lors d’un baccalauréat en biochimie au Département de biochimie et médecine moléculaire de l’Université de Montréal, où elle est aujourd’hui professeure titulaire.
C’est là qu’elle développe un intérêt prononcé pour la recherche, particulièrement grâce aux deux stages qu’elle y réalise. Le premier l’initie à la résonnance magnétique nucléaire (RMN) et le second, se déroulant aux côtés de Robert Cedergren, lui fait découvrir les acides ribonucléiques (ARN) catalytiques.
Outillée de cette technique d’imagerie et curieuse d’en apprendre plus sur les ARN, elle décide de joindre ces deux intérêts en complétant un doctorat à l’Université du Colorado à Boulder, où son projet de thèse portera sur l’étude des ribozymes par RMN.
Toujours à Boulder, elle travaille également dans le laboratoire du colauréat du prix Nobel de chimie 1989, Thomas R. Cech, celui qui a « découvert » les propriétés catalytiques de l’ARN.
« C’était un domaine en pleine ébullition, se rappelle la chercheuse. Grâce à M. Cech, on a pu comprendre que l’ARN n’était pas seulement une molécule qui permet la transmission d’information génétique, mais qui a aussi une fonction propre. Cette découverte a ouvert un tout nouveau champ de recherche sur l’ARN et a démontré l’importance des ARN non codants, ceux qui ne sont pas traduits en protéine par les ribosomes. »
Son désir de vouloir connaître le fondement des mécanismes biologiques l’incite alors à entamer un parcours en recherche fondamentale, axé sur la biochimie, mais également la biologie structurale.
« J’ai rapidement compris que la médecine n’avait pas une réponse à tout et que pour pouvoir aller plus loin, il fallait faire de la recherche fondamentale. Même si la recherche est un travail de longue haleine, on apprend tous les jours. »
Après cinq années de carrière scientifique à l’Université de Géorgie, à Athens aux États-Unis, Pascale Legault se voit offrir un poste à l’Université de Montréal, son alma mater. Aménagé au pavillon Roger-Gaudry depuis bientôt 16 ans, son laboratoire de recherche « étudie les ribozymes comme système modèle pour mieux comprendre la structure, la fonction et l’ingénierie des ARN de façon très générale et très fondamentale ».
Les ribozymes, mot-valise formé à partir des mots « acide ribonucléique » et « enzyme », sont des ARN catalytiques, donc des ARN qui ont une fonction et qui peuvent accélérer une réaction chimique. Un sujet de recherche qui enthousiasme particulièrement la chercheuse. « S’il n’y avait pas d’enzymes, il n’y aurait pas de vie. Ce sont des molécules qui permettent d’accélérer les processus chimiques qui se passent dans notre corps. Si les réactions ne se passaient pas aussi vite, par exemple avec la digestion, on ne pourrait pas vivre comme on vit aujourd’hui. »
Depuis les dernières années, Pascale Legault a développé un nouvel intérêt de recherche : l’étude des micro-ARN, de petits ARN non codants qui se trouvent en grande quantité chez l’humain et qui contrôlent plusieurs phénomènes dans le corps. « On essaie de comprendre leur fonctionnement, comment des ARN si petits ont un rôle si gigantesque. Ils contrôlent l’expression de plus de la moitié des gènes humains et sont particulièrement importants au niveau du système nerveux, pour le développement du cerveau et les fonctions neuronales. »
Cette recherche fondamentale est importante pour comprendre les mécanismes impliqués dans les maladies neurologiques. D’ailleurs, madame Legault a précédemment obtenu une subvention de Parkinson Canada afin d’approfondir la compréhension des micro-ARN dans le système nerveux, principalement au niveau des maladies neurodégénératives, telle la maladie de Parkinson.
Pascale Legault est sans contredit une mordue de recherche. Titulaire de la Chaire de recherche du Canada en biologie structurale de l’ARN, sa réputation dépasse largement les limites du Québec. À l’Université de Montréal, elle s’implique avec beaucoup d’énergie dans l’organisation et le fonctionnement des plateformes de biologie structurale. À cet effet, elle a reçu un financement de la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI) afin d’installer au pavillon Roger-Gaudry une nouvelle plateforme scientifique servant à appréhender avec précision la structure, le fonctionnement et la dynamique des biomolécules.
« Ma vie, c’est vraiment la recherche! », s’exclame-t-elle un sourire dans la voix.
Son ardeur, son expertise et son dévouement lui ont permis de devenir le 1er juin 2019 la directrice du Département de biochimie et médecine moléculaire de l’Université de Montréal, le département qui a vu naître sa vocation scientifique et son engouement pour la biochimie.
« Quand j’étais jeune, je ne savais pas exactement ce que je voulais faire plus tard. Je pense que je voulais rester à l’école pour toujours, parce que j’aimais tellement ça. Et c’est un peu ce que j’ai fait, je suis toujours à l’école! », confie la chercheuse en riant.
« Aujourd’hui, je rêve d’une société qui valorise davantage la recherche fondamentale, car ce type de recherche permet d’étendre les limites du savoir et de stimuler les innovations pour la médecine de demain. »
Juin 2019
Rédaction : Béatrice St-Cyr-Leroux
Photo : Benjamin Seropian