Pascal Chartrand

Aller au fond des choses

Chercheur à temps plein et gastronome à temps partiel, Pascal Chartrand aime la science pour la même raison qu’il aime la cuisine : pour mettre ses mains au service de son cerveau actif.

« La cuisine, c’est comme la biochimie, confie le professeur titulaire au Département de biochimie et médecine moléculaire. On suit un protocole, on fait une expérience, puis on analyse ce qui fonctionne bien… ou pas! »

Si la gastronomie permet à Pascal Chartrand de se détendre, c’est vraiment la recherche qui l’anime au quotidien. Dès son entrée à l’Université de Montréal, au baccalauréat en biochimie, il s’intéresse à la carrière de chercheur, plus précisément au travail manuel sur la « paillasse », le terme affectueux qui désigne la table de manipulation dans un laboratoire.

C’est cet appétit pour l’action et la découverte qui le pousse à faire son doctorat aux côtés de Robert Cedergren, biochimiste de renom, professeur émérite au Département de biochimie et membre du premier contingent de recherche en bio-informatique à l’Université de Montréal. Ensemble, ils travaillent sur les acides ribonucléiques (ARN) catalytiques et l’évolution de l’ARN chez différentes espèces. Ils développent également les premiers outils en bio-informatique pour comprendre en trois dimensions le rôle de l’ARN et l’activité au niveau catalytique.

Fabriquée sur le modèle de l’ADN, l’ARN est une molécule qui sert de base à la formation des protéines chez l’ensemble des êtres vivants. C’est justement « l’approfondissement des processus à la base du vivant » qui attire le chercheur.

« Mon superviseur au doctorat a beaucoup attisé ma passion pour la recherche. Sa vision et ses intérêts multiples me stimulaient particulièrement. Il m’a aussi appris à suivre mon instinct. En recherche, on ne sait jamais où ça va nous mener. La voie n’est pas tracée tout droit, on ne sait pas quel chemin va nous amener vers l’aboutissement. »

Exalté par l’inconnu, la nouveauté et les défis, Pascal Chartrand entame des études postdoctorales, mais cette fois-ci à New York, au laboratoire de Robert H. Singer à l’Albert Einstein College of Medicine. Il y passe cinq ans à développer des techniques d’imagerie pour parvenir à détecter l’ARN dans les cellules, principalement chez les levures, et à travailler sur les mécanismes de transport et de localisation de l’ARN messager (ARNm).

En recherche, on ne sait jamais où ça va nous mener. La voie n’est pas tracée tout droit, on ne sait pas quel chemin va nous amener vers l’aboutissement.

Fort de son expertise diversifiée en biochimie, en enzymologie, en biologie cellulaire et en microscopie, il accepte un poste de chercheur à l’Université de Montréal où il poursuit ses travaux sur le transport de l’ARNm et la dynamique des ARN. Son objectif : comprendre les mécanismes moléculaires et leurs rôles dans l’apparition de maladies.

« Je m’intéresse à la façon dont les êtres humains fonctionnent, évoluent, mais surtout comment des défauts dans certains mécanismes peuvent mener à des problèmes de santé, comme des cancers ou des maladies musculaires. C’est fascinant quand on pense aux incidences que peuvent avoir de toutes petites modifications d’un gène. »

À ce sujet, M. Chartrand étudie actuellement les anomalies génétiques qui engendrent la dystrophie myotonique de type 1, la forme la plus répandue de dystrophie musculaire adulte. « Cette maladie est causée par une mutation dans un gène qui crée des répétitions qui s’amplifient dans ce gène, explique-t-il. Quand l’ARN de ce gène est exprimé, celui-ci est agrégé dans le noyau et séquestre des protéines, ce qui affecte leur fonction. On essaie donc de comprendre comment ce processus d’agrégation se produit. » Grâce à cette analyse, il a participé au développement d’un composé pharmacologique visant à diminuer les défauts observés dans les muscles des personnes atteintes de la dystrophie myotonique de type 1.

D’ailleurs, Pascal Chartrand est également membre du Groupe de recherche universitaire sur le médicament (GRUM), un groupe interdisciplinaire axé sur la découverte et l’évaluation des médicaments. C’est là qu’il participe à concrétiser ses recherches.

En aidant à l’élaboration de traitements potentiels, ses recherches, de nature d’abord fondamentale, ont donc des retombées tangibles sur la population. « Comme on travaille sur un campus universitaire, on n’a pas souvent de contact avec les personnes affectées par les maladies, mais c’est toujours très valorisant de savoir que notre recherche peut avoir un impact direct sur leur santé », précise le chercheur.

Si le souci d’améliorer la qualité de vie des malades est une source de motivation pour le chercheur et père de trois enfants, le désir d’assurer la relève l’est tout autant. Professeur dévoué, il aime particulièrement voir ses étudiants « se développer, maturer et éventuellement devenir des collègues ». Mais lorsqu’on lui demande s’il préfère la recherche à l’enseignement, il hésite. « Je suis autant un chercheur qu’un professeur. C’est la recherche qui m’a donné envie d’aller dans ce domaine, mais je trouve très stimulant de transmettre mon expérience aux étudiants. »

Entre les demandes de fonds, la révision d’articles et la supervision de son laboratoire, Pascal Chartrand profite du temps qu’il lui reste pour se consacrer à ses deux fils et sa fille. Et pour renouer avec sa paillasse et ses protocoles, il leur concocte de bons petits plats.

 

Mars 2019

Rédaction : Béatrice St-Cyr-Leroux
Photo : Benjamin Seropian

Affiliation principale

Lieu de travail

Pavillon Roger-Gaudry de l’Université de Montréal

Disciplines de recherche

– Analyse structurale des macromolécules
– Dynamique cellulaire des macromolécules

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