Tarik Möröy

Comprendre la génétique des maladies

Quand Tarik Möröy effectuait les expériences pour sa thèse de doctorat à l’Institut Pasteur à Paris dans les années 80, il ne se doutait pas que sa connaissance du français le mènerait un jour à Montréal. En 2006, le chercheur quitte son Allemagne natale pour prendre la barre à titre de président et directeur scientifique de l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM), une institution affiliée à l’Université de Montréal.

De son bureau avec vue sur le mont Royal, Tarik Möröy veille depuis plus de 10 ans au bon fonctionnement de cette organisation de renommée mondiale et de ses 35 unités de recherches, dix plateaux et plateformes technologiques et cinq cliniques de recherche. De plus, il dirige une unité de recherche. Möröy s’intéresse aux maladies génétiques, notamment en tentant de révéler les mécanismes qui conduisent au cancer dans le système hématopoïétique, c’est-à-dire, à la leucémie et au lymphome. « Le système hématopoïétique décrit l’ensemble des cellules sanguines, soit les globules rouges et les globules blancs. Ceux-ci peuvent produire entre autres des plaquettes [sanguines] ou des cellules du système immunitaire qui produisent des anticorps ou qui nous défendent contre des infections virales. Toutes les cellules sanguines sont produites par des cellules souches hématopoïétiques qui se trouvent dans la moelle osseuse. La particularité de ces cellules souches est qu’elles sont la source de toutes nos cellules sanguines parce qu’ils ont la capacité de s’autorenouveler durant toute notre vie », précise le professeur chercheur titulaire au Département de microbiologie, infectiologie et immunologie de l’Université de Montréal.

Il existe plus de 7 000 de ces maladies. Entre 500 000 et 600 000 Québécois [2,5 millions de Canadiens] en sont atteints. Les maladies sont peut-être rares, mais les patients eux sont nombreux ! Mais comme il y a peu de recherches effectuées sur les maladies rares, peu de médicaments et de traitements sont conçus.

L’intérêt de M. Möröy pour le système hématopoïétique, les cellules sanguines, les leucémies et les lymphomes est né alors qu’il réalisait son postdoctorat à l’Université Columbia à New York. « C’est à ce moment que j’ai appris à créer des souris génétiquement modifiées. Ses animaux servent comme modèle pour mieux comprendre comment les leucémies et les lymphomes surviennent chez l’humain. À l’époque c’était une toute nouvelle technologie qui est encore indispensable aujourd’hui pour la recherche sur beaucoup de maladies, mais aussi pour mieux comprendre la complexité de la biologie humaine. »

Dans son laboratoire à l’IRCM, Tarik Möröy et son équipe planchent actuellement sur divers projets de recherche notamment en lien avec les maladies rares comme les troubles plaquettaires et le syndrome myélodysplasique (SMD). Le syndrome myélodysplasique est une anomalie de la moelle osseuse qui fait en sorte que la maturation de cellules souches en cellules sanguines plus matures est perturbée. « Ce qui rend cette situation dangereuse est le fait qu’une SMD se développe souvent en une leucémie myéloïde aigüe (LAM), une maladie très grave et souvent fatale. Nous nous intéressons à une molécule qui régule l’activité génique (nommé “GFI1”) et qui est indispensable pour un bon fonctionnement de cellules souches. Nous avons observé que le taux d’expression de GFI1 peut servir comme biomarqueur pour le risque de transition SMD-LAM. Un autre exemple est la molécule GFI1B (relié à GFI1). GFI1 et GFI1B peuvent déterminer si une cellule souche s’oriente vers une lignée cellulaire rouge ou une lignée cellulaire blanche. Normalement, il y a un équilibre entre les deux. Lorsque cet équilibre n’est plus maintenu, il y a un risque de maladie. »

L’expertise développée par les laboratoires de l’IRCM dans le domaine de la génétique faisait de cet établissement l’endroit tout indiqué pour la mise sur pied d’un Centre de recherche sur les maladies rares et génétiques chez l’adulte en collaboration avec le Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) et l’hôpital Sainte-Justine. C’est donc sous la gouverne de Tarik Möröy que ce centre unique au Canada a vu le jour en novembre 2016. « Il existe plus de 7 000 de ces maladies. Entre 500 000 et 600 000 Québécois [2,5 millions de Canadiens] en sont atteints. Les maladies sont peut-être rares, mais les patients eux sont nombreux ! Mais comme il y a peu de recherches effectuées sur les maladies rares, peu de médicaments et de traitements sont conçus », déplore M. Möröy. De plus, ces maladies affectent beaucoup d’enfants, mais peu d’études se concentrent sur les adultes. Notamment la phase de transition d’un patient qui quitte les soins pédiatriques et doit s’intégrer dans le système médical pour adultes est très peu étudiée. Améliorer cette transition critique dans la vie des patients atteints de maladies rares sera un élément clé dans le nouveau centre à l’IRCM. Comme l’IRCM possède une clinique où quelque 6000 patients sont traités, ces derniers peuvent participer aux protocoles de recherche menés par ses laboratoires, devenant de précieux collaborateurs pour l’avancement de la recherche sur les maladies rares.

Malgré un horaire de travail très chargé entre la présidence de l’IRCM, la direction de son unité de recherche et l’enseignement à l’Université de Montréal, Tarik Möröy trouve le temps de s’adonner à deux sports qu’il affectionne particulièrement : le golf l’été et le ski de fond l’hiver. Voyager est également un grand plaisir pour le chercheur. Ses coups de cœur ? « La Chine pour son dynamisme et son développement économique époustouflant, et le Mexique pour sa culture méso-américaine, sa grande hospitalité et son soleil en février ! »

 

Mai 2017
Rédaction : Técia Pépin
Photo : Bonesso-Dumas

Affiliation principale

Lieu de travail

Institut de recherches cliniques de Montréal

Disciplines de recherche

– Mécanismes de différentiation des cellules immunitaires
– Facteurs de transcription et épigénétiques
– Leucémies et lymphomes
– Épissage alternatif dans des cellules immunitaires

Chercheuses et chercheurs reliés