L’alimentation est une composante de la santé. Pour la nôtre, mais aussi pour celle de notre planète.
De la ferme au compost, en passant par la table, chaque étape de l’alimentation a un impact environnemental. Les types d’aliments, leur origine et la façon dont ils ont été produits, transformés, emballés et transportés sont des facteurs qui peuvent entraîner de l’érosion, de la déforestation, une diminution de la biodiversité, des émissions de gaz à effet de serre (GES) et l’épuisement des sols.
Conscient de cette réalité et bousculé par l’urgence climatique, le Département de nutrition, par le biais de la formation continue NUTRIUM, a fait la lumière sur l’alimentation durable. Le but : outiller les professionnels de la santé pour adapter leur pratique afin de réduire l’empreinte écologique liée aux choix alimentaires.
Intitulée « Transition vers une alimentation durable : l’affaire de tous! », la plus récente journée de formation continue du département a permis d’éclaircir la question des menus durables et du gaspillage alimentaire, en offrant la tribune à une variété d’experts provenant des sciences de la santé et des sciences sociales.
Réduire son empreinte écologique en mangeant, c’est possible?
La journée de formation s’est ouverte par une conférence donnée par Sylvia Wood, conseillère scientifique chez Future Earth International, un réseau mondial de recherche sur la durabilité. Madame Wood a partagé son expertise concernant les indicateurs écologiques liés à la production alimentaire et leurs effets sur l’environnement : la superficie cultivée, l’eau douce nécessaire, l’engrais utilisé, l’énergie dépensée, les émissions de GES et les émissions d’ammoniac dans les écosystèmes aquatiques.
Selon ses recherches, les opportunités de réduction de l’empreinte écologique sont possibles grâce à un passage à un régime alimentaire végétarien. « En étudiant les régimes santé, méditerranéen et végétarien, nous avons conclu que les indicateurs écologiques du végétarisme sont moindres, affirme madame Wood. Réduire en particulier notre consommation de produits bovins (viande, lait, fromage) améliore considérablement nos impacts écologiques. Toutefois, il y a un bémol pour l’utilisation d’eau douce et d’énergie. »
La part du gaspillage alimentaire
Sylvia Wood a également fait mention de la réduction du gaspillage alimentaire comme facteur de diminution de l’empreinte écologique, dans une mesure comparable au régime végétarien. « C’est une première étape peut-être plus facile et accessible à tous les mangeurs, plutôt que de réduire sa consommation de viande et changer radicalement les types de protéines », a-t-elle fait valoir.
Édith Ouellet, diplômée en nutrition à l’Université de Montréal et cofondatrice de l’Atelier du goût, une école numérique en alimentation durable, a poursuivi la discussion en abordant les tenants et les aboutissants du gaspillage alimentaire.
Selon la nutritionniste, les professionnels de la santé doivent s’initier aux stratégies de base de lutte au gaspillage alimentaire afin d’induire une modification de pratique chez les consommateurs, comme le tiers de la production agricole mondiale est gaspillé.
Parmi ces trucs et astuces, madame Ouellet propose notamment de comprendre que la date de péremption est un gage de fraîcheur et non de salubrité, de tenir un inventaire des réfrigérateurs et congélateurs, de privilégier l’achat en vrac, de planifier l’utilisation des produits les plus périssables et de congeler pour revaloriser plus tard.
« Une bonne façon d’entreprendre une réduction du gaspillage, c’est de commencer une étape après l’autre, de demeurer réaliste et d’éviter les extrêmes, explique la nutritionniste. Aussi, partagez, donnez et échangez! »
À ce sujet, une pétition est présentement en cours d’analyse auprès de la Ville de Montréal pour demander une consultation publique sur le problème du gaspillage alimentaire dans la métropole. Les initiateurs de cette pétition, dont certains membres sont affiliés au Département de nutrition, réclament que des mesures concrètes soient appliquées afin que les invendus des épiceries cessent d’être jetés aux poubelles sans que des organismes puissent les utiliser pour les transformer et les redistribuer dans la population.
De l’individuel à l’institutionnel
D’après Annie Marquez, chef de service – gestion de menu et système d’information diététique au CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, et Béatrice Dagenais, chargée de cours au Département de nutrition, une alimentation durable passe par un changement de culture chez l’individu, mais également sur le plan des structures.
Les deux diététistes évaluent la faisabilité d’adopter des menus durables au sein des services alimentaires des établissements de santé québécois. À leurs yeux, une transformation est envisageable en intégrant des protéines végétales et des aliments pas ou peu transformés, en misant sur une meilleure diversité de produits, en s’approvisionnant auprès de fournisseurs régionaux et en créant des partenariats en économie circulaire.
Madame Marquez a toutefois rappelé que la mise en place d’un menu durable comporte plusieurs défis en raison des six dimensions de l’alimentation durable qui sont difficilement conciliables : la santé, la qualité, l’économie, la gouvernance, l’environnement et les valeurs sociales.
Fabien Durif, directeur de l’Observatoire de la consommation responsable de l’École des sciences de la gestion (ESG UQAM), a également ajouté que « le consommateur est d’abord et avant tout sensible aux avantages économiques et l’achat en vrac reste un réflexe à construire ».
Ainsi, tous les experts présents à la formation s’entendent pour dire que l’adoption d’une alimentation durable nécessite une profonde mutation des mentalités, dans laquelle les professionnels de la santé ont un rôle important à jouer.
À propos de la formation continue NUTRIUM
Le Département de nutrition, par le biais de la formation continue NUTRIUM, organise et offre aux professionnels de la santé, notamment aux nutritionnistes en exercice, des séances de formation continue sur différents sujets d’actualité en nutrition et en alimentation pertinents pour la pratique professionnelle.
Les activités de formation sont données sur le campus de l’Université de Montréal par des conférenciers experts et peuvent être suivies sur place ou à distance par visioconférence ou en webdiffusion.
Rédaction : Béatrice St-Cyr-Leroux