Yves Brun invite les Québécois à prendre part à la lutte contre l’antibiorésistance

Quels types de bactéries vivent dans les environnements qui nous entourent? Sont-elles utiles, inoffensives ou nuisibles? Quelle proportion de ces bactéries sont résistantes aux antibiotiques?

Voilà les questions qui ont inspiré Yves Brun et son équipe de chercheurs à s’inscrire au tout nouveau programme de recherche des Fonds de recherche du Québec (FRQ) visant la production de connaissances scientifiques avec la participation active de citoyens. Intitulé « Engagement – programme pilote » ce programme finance cinq projets, dont celui de l’équipe menée par monsieur Brun, microbiologiste de renom et professeur titulaire au Département de microbiologie, infectiologie et immunologie.

Nommée « Découverte et visualisation des profils de résistance aux antibiotiques par les explorateurs de l’environnement », leur étude porte sur l’antibiorésistance et implique les Scientifines, la Société des arts technologiques (SAT) et les Water Rangers. Les Scientifines font la promotion des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STIM) auprès des jeunes filles de milieux urbains défavorisés et les Water Rangers sont des citoyens cherchant à documenter et analyser la qualité de l’eau.

« Nous sommes enthousiastes et engagés dans l’idée de promouvoir la culture scientifique et d’élargir la compréhension générale de la recherche, témoigne Emily Sprowls, associée de recherche au laboratoire de monsieur Brun. Nous voulons partager avec autrui notre intérêt pour le monde microbien invisible et en apprendre davantage à son sujet, en compagnie d’autres personnes curieuses de leur environnement. »

Un projet collaboratif entre science et art

De façon pratique, l’étude s’articulera selon plusieurs axes, en commençant par l’analyse de la qualité de l’eau de divers milieux. Munis de kits, les citoyens seront en charge de recueillir des échantillons dont les données seront partagées sur le site Web des Water Rangers. Ensuite, les échantillons seront analysés avec la plateforme robotique à haut débit du laboratoire de monsieur Brun, laquelle permet de traiter simultanément des centaines d’échantillons, d’en photographier les bactéries et d’évaluer leur résistance aux antibiotiques.

« Les phases d’échantillonnage du projet permettront aux citoyens de participer à la collecte de données, à l’analyse et à la vérification des hypothèses émergentes, les engageant ainsi dans le processus complet de l’investigation scientifique, précise le microbiologiste Yves Brun, également titulaire de la Chaire de recherche Canada 150 sur la biologie cellulaire bactérienne. Nous espérons que cela leur permettra de mieux comprendre l’importance de la science et des données probantes, et d’être mieux équipés pour reconnaître les fausses nouvelles. »

Autre volet : le grand public pourra aussi collaborer avec des artistes de la SAT dans des ateliers où il visualisera les données qu’il aura contribué à produire et où apprendra à les présenter. Ces images de bactéries et les créations artistiques qu’elles inspireront seront présentées dans des expositions en collaboration avec la SAT et le Musée Armand-Frappier, un musée lavallois consacré à l’interprétation des sciences relatives à la santé humaine.

« Le projet de monsieur Brun s’intègre pleinement dans la mission de la SAT, et permet de valoriser ses savoir-faire pour une cause sociale, affirme Claire Paillon, directrice de la valorisation de la recherche à la Société des arts technologiques. Ici, l’art soutient un effort de vulgarisation pour communiquer des données complexes et permettre aux citoyens de s’approprier le sujet des bactéries qui résistent aux antibiotiques. »

L’antibiorésistance, un problème d’envergure

« Les bactéries résistantes aux antibiotiques représentent un risque pour la santé qui pourrait conduire à la prochaine crise de santé publique. » Yves Brun ne le répètera jamais assez.

C’est d’ailleurs dans l’intention de minimiser ce risque que le chercheur et son équipe souhaitent que les citoyens approfondissent leurs connaissances sur l’antibiorésistance, ses causes et les façons de freiner sa propagation. Le projet de recherche possède donc une visée sensibilisatrice, en plus d’aider les scientifiques à comprendre comment la résistance aux antimicrobiens est distribuée dans l’environnement.

« L’émergence de bactéries résistantes aux antibiotiques menace de nous ramener à l’horreur de l’ère pré-antibiotique, où une simple blessure ou une opération chirurgicale entraînait souvent la mort par infection bactérienne, réitère le scientifique.Lorsque nos citoyens collaborateurs auront acquis une meilleure connaissance de ce problème, ils deviendront à leur tour vecteurs de savoir scientifique en partageant ces informations avec leurs proches, aidant ainsi à changer les mauvaises pratiques de surutilisation d’antibiotiques. »

 

Rédaction : Béatrice St-Cyr-Leroux

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