Des scientifiques découvrent une nouvelle fonction de la « matière sombre » cellulaire dans le maintien de l’intégrité du génome

Des chercheurs du Département de biochimie de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal ont découvert comment la télomérase, une molécule qui joue un rôle central dans le développement du cancer, est acheminée vers des structures du génome, les télomères, pour maintenir leur intégrité et, ce faisant, l’intégrité du génome lui-même.

Dans le dernier numéro de Molecular Cell, publié aujourd’hui, les scientifiques expliquent que les molécules de télomérase sont recrutées par TERRA, une molécule d’ARN non codant qui n’avait jusqu’à présent aucune fonction connue dans la cellule. Les scientifiques ont utilisé des techniques de microscopie de pointe pour visualiser et suivre les molécules de télomérase alors qu’elles étaient acheminées vers les télomères par TERRA. « Les ARN non codants constituent la “matière sombre du génome”, car ils sont abondants, mais on ignore presque tout de leur fonction », explique Pascal Chartrand, Ph. D., chercheur principal et professeur au Département de biochimie.

« À chaque division cellulaire, les chromosomes, ces longues molécules d’ADN qui codent les gènes, doivent être répliqués. Mais la machinerie responsable de cette réplication est imparfaite, car elle ne parvient pas à copier l’ADN jusqu’à l’extrémité des chromosomes. Comment les cellules vivantes se divisent et comment ce processus se réalise sans erreur est l’une des plus grandes énigmes que la science tente d’élucider depuis des dizaines d’années. Ce sont également les défaillances de ce processus qui sont à l’origine du vieillissement et du cancer, ajoute le Pr Chartrand. Pour protéger les extrémités des chromosomes, l’évolution a trouvé une solution assez simple. Des brins d’ADN supplémentaires, les télomères, sont fixés à l’extrémité des chromosomes; chaque fois que les chromosomes sont répliqués, la machinerie de réplication décode les télomères, ce qui protège l’intégrité de tous les gènes. La réplication a pour conséquence de tronquer les télomères, mais une autre molécule, la télomérase, ajoute un nouveau brin d’ADN aux télomères tronqués pour les ramener à leur longueur originale. La télomérase est inactive dans la plupart de nos cellules, de sorte qu’après plusieurs réplications des chromosomes, les télomères ont été tronqués à un point tel que les cellules ne peuvent plus se diviser et finissent par mourir. Cela ne se produit pas dans les cellules cancéreuses : dans ces cellules, la télomérase reste active et les cellules deviennent immortelles. »

Le gène de la molécule d’ARN non codant TERRA se trouve dans les télomères, et on se doutait qu’il jouait un rôle dans l’intégrité de celles-ci. Pour découvrir comment TERRA protégeait les télomères, les collaborateurs du Pr Chartrand, Emilio Cusanelli, auteur principal de l’étude, et Carmina Angelica Perez Romero ont lié une sonde moléculaire fluorescente à TERRA pour suivre par microscopie son évolution dans la cellule. Ils ont découvert que la production de TERRA est déclenchée quand le télomère portant son gène est tronqué. Ils ont ensuite observé que les molécules de TERRA s’accumulent en un point précis et, au même moment, recrutent des molécules de télomérase qui sont ensuite acheminées vers le télomère tronqué ayant déclenché la production de TERRA.

Cette découverte révèle un tout nouveau mode de régulation de l’activité des télomérases, ainsi qu’un nouveau rôle de l’ARN non codant dans l’entretien du génome. TERRA pourrait également devenir un nouveau candidat dans la recherche d’un traitement contre le cancer.

Notes :
Les recherches menées dans le cadre de l’étude intitulée « Le tronquage des télomères déclenche le recrutement des télomérases aux télomères tronqués par l’ARN non codant d’origine télomérique TERRA » ont été financées par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), subvention MOP-89768.

À propos du département de Biochimie de l’Université de Montréal
À propos des recherches du Pr Chartrand

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