Quand le toucher fait mal

Imaginez ceci. Vous vous êtes endormi sur la plage et avez attrapé un énorme coup de soleil sur votre main. C’est très douloureux, mais ça passera.

Maintenant, imaginez cette même douleur lancinante à la main, mais qui dure des mois et des mois et entrave tous vos gestes quotidiens. D’un simple courant d’air à la prise d’un objet, en passant par le port de gants, vous vivez un perpétuel désagrément. Voilà l’allodynie.

« L’allodynie est une douleur déclenchée par une stimulation normalement indolore, une hypersensibilité au toucher », explique Isabelle Quintal, ergothérapeute, étudiante à la maîtrise en sciences de la réadaptation et membre étudiante du Centre de recherche interdisciplinaire en réadaptation du Montréal métropolitain (CRIR).

Isabelle Quintal étudie spécifiquement l’allodynie causée par des lésions nerveuses périphériques, donc qui se produisent dans les nerfs situés à l’extérieur de la moelle épinière. Clinicienne depuis 14 ans, elle s’intéresse surtout aux méthodes pour rééduquer ce trouble de sensibilité cutanée et tactile. Dans le cadre de son projet de maîtrise, elle étudie une de ces techniques, soit la méthode de rééducation sensitive de la douleur (MRSD).

Une approche de traitement novatrice

La MRSD est une technique initialement développée par Claude Spicher, ergothérapeute et collaborateur scientifique à l’Université de Fribourg, en Suisse. Madame Quintal a également collaboré au perfectionnement de cette méthode mise au point afin de traiter les patients pour qui la technique la plus répandue, la désensibilisation, n’est pas efficace.

La désensibilisation propose de progressivement habituer la peau à diverses stimulations tactiles, que ce soit des tissus ou des textures. « On commence par la soie, puis on va vers le coton et on progresse jusqu’au velcro, par exemple, précise Isabelle Quintal. L’idée, c’est qu’éventuellement la peau soit capable de percevoir ces stimulations comme non douloureuses. »

La MRSD, quant à elle, implique seulement des textures douces au toucher – les plus rudes étant trop douloureuses – et traite plutôt à distance la région sensible. « Avec cette technique, on commence à l’extérieur de la zone allodynique et on s’en rapproche progressivement. Par exemple, si c’est la main qui est sensible, on part de l’épaule et, de semaine en semaine, on avance tranquillement vers la main. »

Confiante que les résultats de son projet clinique fourniront des données probantes sur l’efficacité de cette méthode, Isabelle Quintal espère également que son étude pourra sensibiliser les professionnels de la santé à cette technique.

« Au final, je souhaite que la MRSD soit connue du plus grand nombre de cliniciens, afin que le plus de patients possible puissent en bénéficier. Ses effets sont prometteurs en termes de diminution de la douleur, d’augmentation de la fonction de la région allodynique et d’amélioration de la qualité de vie. »

Isabelle Quintal est ergothérapeute diplômée de l’Université de Montréal, où elle donne des cours sur les troubles de la sensibilité et la douleur. Depuis 2012, elle travaille également au Centre Professionnel d’Ergothérapie à Montréal, principalement auprès d’une clientèle ayant des problèmes musculosquelettiques et présentant de la douleur neuropathique et/ou chronique.

Elle mène son projet de recherche intitulé « Caractérisation des approches de stimulation tactiles avec allodynie à la main », sous la direction de Daniel Bourbonnais et Joseph-Omer Dyer, professeurs à l’École de réadaptation.

Rédaction : Béatrice St-Cyr-Leroux

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